Les arènes de Nîmes ont affiché une petite affluence avec pourtant un mano a mano alléchant où les toros de La Quinta avaient la tâche d’arbitrer les débats entre Daniel Luque et Emilio de Justo. Tant dans le résultat artistique que dans le résultat comptable, c’est Daniel Luque qui s’est largement distingué devant une corrida entretenue de La Quinta, inégale dans son ensemble, où plusieurs toros ont montré des qualités intéressantes.
Le lot de La Quinta, s’est présenté plutôt juste de trapio, aux armures très différentes les uns des autres, supérieur le troisième. Dans le comportement, on a pu constater plusieurs toros très différents, certains nobles avec un certain manque de transmission (1°/2°/5°), d’autres plus réservé mais se livrant petit à petit (3°/4°) puis un dernier toro (6°), avec une pointe de manso mais encasté qui a donné un réel intérêt dans les trois tiers. Il prit deux piques avec entrega avant un dernier tiers où sa caste lui permit de dominer les débats.
Daniel Luque a vécu une tarde proche de la perfection. Malgré un handicap physique certainement contraignant, la prestation de l’espagnol fut au-dessus d’un lot pourtant de qualité. Le torero de Gerena a maîtrisé ses trois sorties du début à la fin avec une seconde prestation supérieure, où il est allé puiser les qualités au fond d’un toro dont personne ne pouvait imaginer les possibilités. Luque s’en va de Nîmes avec 5 oreilles en poche et le sentiment du devoir accompli.
Le tableau est plus contrasté en revanche pour un Emilio de Justo qui ne parvient pas à retrouver les sommets. En difficulté tout au long de la tarde devant des adversaires exigeants, l’extremeño est tout de même parvenu, le temps de trois séries, à nous rappeler les bienfaits de son toreo. Malheureusement, c’est dans un toreo plus superficiel qu’Emilio se réfugia le reste du temps, pour couper un total de trois oreilles. Une tarde bien payée pour le résultat artistique. On espère tous que l’hiver lui fera du bien pour retrouver chez ce garçon, les qualités qui ont fait de lui un torero de premier plan.
A noter la belle mise en suerte de Jérémy Banti, invité par Daniel Luque devant le dernier toro de la tarde. Des chicuelinas bien réalisées qui ont conduit le toro à la première rencontre équestre.
Toro a Toro
Le premier toro de La Quinta prend 2 piques dosées. L’animal est d’une grande noblesse malgré une manque de transmission criant. C’est le carreton parfait pour Daniel Luque qui trace une faena millimétrée. Toreo relâché, agréable et temple pour une nouvelle leçon de Daniel Luque conclue par une bonne entière qui libère deux oreilles.
Emilio de Justo torée loin son premier adversaire de La Quinta, sur la réserve et hésitant. L’espagnol ne parvient pas à obliger son toro, se contentant de plusieurs séries sur le passage. Il coupe une petite oreille après une épée basse.
Le troisième La Quinta est bien armé. 2 piques avec lidia discrète. Salut de Ivan Garcia aux banderilles. Le toro est sur la réserve. Il charge avec une certaine violence sur les premières séries. Daniel Luque prend le temps d’observer et de mesurer son adversaire. Il livre plusieurs séries prudentes pour prendre la température. Cette entame discrète sera finalement la clé d’une seconde partie de faena vibrante où Luque parvient à corriger l’animal pour lui servir plusieurs séries de valeur. Il va chercher le toro dans ses retranchements pour obtenir une oreille de poids.
Le quatrième toro de La Quinta est exigeant mais il a des moteurs et de vraies qualités. Emilio de Justo est débordé sur les deux côtes. Il n’arrive pas à imprimer son propre tempo et se réfugie dans un toreo périphérique qui ne met pas en valeur l’ensemble des qualités du toro.
Le cinquième est un toro légèrement sur la réserve à son entrée en piste. C’est Jeremy Banti qui effectue la mise en suerte par de belles chicuelinas précises. C’est autout de Daniel Luque de servir plusieurs véroniques templées conclues d’une demi de peinture. Dès l’entame, Daniel Luque domine son adversaire pour le canaliser et mettre à profit ses qualités. Il sert une faena relâchée plaisante où il récite parfaitement ses gammes. Il termine sa prestation par deux séries de naturelles sur chaque bord, sans l’aide de l’épée. Il tue d’une entière en place qui délivre deux nouvelles oreilles.
Le dernier La Quinta est manso et tourne court. Emilio de Justo laisse le soin de la lidia à son banderillero. Le toro part une première au cheval avant de faire aussitôt demi-tour au contact de la pique. Il renverse une première fois le cheval sur la rencontre suivante, puis une seconde fois en revenant. Le toro pousse avec race sur les deux réelles rencontres pour un tercio de varas vibrant. Le public siffle à tort un picador qui réalise bien son travail. Le temps de trois séries, on retrouve le Emilio de Justo à ses anciennes gloires. Un toreo pur et dominateur qui transmet avec les tendidos. Malheureusement il ne parvient pas à garder la même intensité dans son engagement et recule à plusieurs reprises devant les charges encastés d’un toro très intéressant. Là aussi, le toro avait plus à donner pour une faena qui aurait pu être plus précise. C’est finalement une entière un peu basse efficace qui libèrent deux petites oreilles.
Nîmes, Vendredi 15 septembre 2023
6 toros de La Quinta pour
Daniel Luque : 2 oreilles, une oreille et 2 oreilles
Emilio de Justo : une oreille, salut et 2 oreilles
Jean Dos Santos