A Robliza de Cojos, située à une trentaine de kilomètres de Salamanca, la ganaderia Juan Luis Fraile s’épanouie dans un magnifique Campo. Juan Luis Fraile « hijo » dirige l’élevage familial d’origine Graciliano depuis la mort de son père à la fin des années 90. Nous l’avons rencontré lors d’une fraîche matinée où la pluie s’est invitée à quelques reprises pendant notre visite…
Juan Luis Fraile entame sur l’origine de la ganaderia « Mon père Juan Luis Fraile a acheté en 1972 la ganaderia à Germán Pimentel Gamazo et Matías San Román. Tout le bétail est de pure origine Graciliano Pérez Tabernero. Nous possédons aujourd’hui le sang le plus pur possible de cette origine. Il y a quelques ganaderias très proches de ce sang comme Hoyo de la Gitana, Valdellan ou Pilar Poblacion mais pas aussi pûr que le nôtre. Chacun a fait sa ganaderia à sa manière, mais pour notre part, nous avons toujours conservé cette origine sans la croiser avec une autre ».
Un cheptel unique donc qui repose sur diverses vieilles familles au sein de la même ganaderia. Le sang Graciliano descend de la branche Santa Coloma, mais l’origine Graciliano est bien spéficique aux autres branches. Cela donne au toro de Juan Luis Fraile des robes très linéaires « Notre toro a une robe très noire et assez régulière sur l’ensemble de la camada. »
Avec une petite quinzaine de toros dans le Campo pour 2024, Juan Luis Fraile nous confie qu’il a vendu la majorité de sa camada en novillada l’an passé. Ce sont seulement deux corridas qu’il reste à lidier chez le ganadero salmantino pour la Temporada 2024. A l’heure actuelle, elles n’ont toujours pas trouvé preneur.
Au campo, on remarque que les toros n’ont pas de Funda chez Juan Luis Fraile, le ganadero s’explique « Le problème des fundas c’est que les toros se font encore plus mal lorsqu’ils les portent. Ils ne se rendent pas compte des coups qu’ils s’infligent, et cela leur provoque des blessures internes très sévères. En plus de ça, le toro de Juan Luis Fraile est un toro qui ne s’abîme pas les cornes. La fonction première des Fundas, est de garder les pitons en bon état. »
Mais ce n’est pas la seule raison qui pousse le ganadero a laissé les toros cornes nues dans le campo « Les premières années où on a mis les Fundas à nos toros, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait plus de perte qu’au moment où ils ne les avaient pas. » Un constat sans appel qui laisse place au toro dans son environnement dans le plus brut des états.
Sur les caractéristiques du toro de la maison, le ganadero cherche la bravoure en priorité. Leur sélection est très drastique « Bien sûr, nous voulons des vaches qui se laissent toréer lors des tientas. Mais la priorité de notre sélection est que les toros aillent au cheval. Lors des tientas, le critère numéro 1 est le cheval ». Bravoure donc, pour briller lors d’un tercio de varas qui n’est pas toujours au rendez-vous dans les arènes « La suerte de varas est en train de se perdre en Espagne. C’est une belle suerte mais ici, c’est en train de se perdre ! C’est notamment dans les corridas de figuras que la pique n’a quasiment plus aucune importance. Dans ce type de corrida, on met le toro au cheval comme une habitude, mais sans vraiment qu’il y ait une nécessité. » confie Juan Luis avec un peu de peine, avant de faire le lien sur son propre fer « La suerte de varas bien exécutée est une belle suerte. On met le toro en valeur, on le fait venir de loin. C’est ce qu’on aime chez Juan Luis Fraile. »
En 2024, Juan Luis Fraile n’emmènera pas de bétail en France pour la première fois depuis plusieurs saisons. Camada plus restreinte et choix des organisateurs, c’est sans amertume que le ganadero nous informe de cette absence. Il faut également préciser que la manque de toros est également dû à la maladie du moustique qui sévit sur l’Espagne depuis quelques temps « Elle a fait beaucoup de mal à notre camada. Nous avons perdu plusieurs toros depuis le début de l’épidémie qui est difficile à gérer. » Une saison de transition donc, avec deux lots de toros encore disponibles qui devraient trouver preneur en Espagne, dans des coins où le toro y est apprécié à sa juste valeur.
Entretien réalisé le 11 février par Jean Dos Santos