Raphaël Raucoule dit « El Rafi » est matador de toros français né à Nîmes en 1999. Agé de 23 ans, il a pris l’alternative en 2021 dans les arènes d’Arles. Depuis cette étape clé, le jeune torero a toréé 11 corridas avec des triomphes dans les arènes de Nîmes, Istres ou des Saintes Maries de la Mer.
Suite à la proposition de loi d’Aymeric Caron, El Rafi fait parti des toreros qui sont montés aux créneaux dans les médias nationaux pour défendre la tauromachie. Le nîmois est intervenu sur plusieurs radios pour y défendre ses convictions et celles des aficionados.
A l’aube de sa troisième temporada de matador de toros, j’ai rencontré El Rafi pour aborder avec lui la progression de sa carrière et revenir par la même occasion aux dernières actions qu’il a mené au sein de l’association des matadors de toros français.
Sa trajectoire, El Rafi la doit en partie à son grand-père qui a travaillé pendant de nombreuses années aux arènes de Nîmes. C’est par ce biais qu’il a découvert la tauromachie avant que cela devienne plus qu’une simple passion.
Sa carrière est liée à un homme : Patrick Varin. Ancien matador de toros français, Varin s’est reconverti en professeur et apoderado. Ils se sont rencontrés à l’école taurine de Nîmes pour ne plus jamais se séparer « Patrick m’a tout apporté, que ce soit sur le plan humain ou tauromachique. Il a influé sur ma manière d’être un homme, d’être quelqu’un de respectable et de respecter. ». Ses débuts dans l’arène furent convainquant au point de devenir l’un des espoirs de la tauromachie français, sans jamais griller les étapes.
De novillero, El Rafi a connu plusieurs succès avec notamment un triomphe dans les arènes de Valencia mais aussi des présences remarquées dans plusieurs férias importantes. Est arrivé le covid qui a restreint la progression du nîmois « Il y a des endroits en Espagne où il y a beaucoup de répercutions lorsque tu triomphes. J’aurais par exemple aimé retourner à Valencia où j’avais triomphé l’année d’avant. J’ai toréé une petite quarantaine de novilladas piquées, ce qui peut paraître très bien mais aussi peu à la fois. »
Cela peut paraître peu car il est important de rappeler que le passage en novillada permet au torero de se forger techniquement, en affrontant souvent une diversité d’encaste important pour engranger de l’expérience. « Si l’on compare il y a 10 ans, les novilleros toréait 70/80 novilladas avant de prendre l’alternative. Mais je suis fier d’avoir pu toréer dans les plus grandes arènes d’Europe ce qui m’a permis d’avoir une base solide. »
Après 3 saisons et demi en novillada piquée, c’est l’alternative qui s’inscrit dans une continuité « J’ai pris l’alternative le 6 juin 2021 à Arles. Ça représente pour moi la suite logique de mon apprentissage de novillero. » Qui dit alternative, dit nouvelle adversité avec des toros de 4 ans minimum. A 4 ans, le toro n’est plus le même qu’un novillo de 3 ans. Le comportement et le trapio changent. Un passage délicat comme me l’explique Rafi « J’ai dû continuer ma formation et mon rodage en tant que matador de toros. Ce n’est pas l’idéal car ce n’est pas le même circuit, les toros sont beaucoup plus exigeants et plus imposants. On se retrouve avec des compagnons de cartel plus expérimentés et le public y est forcément plus exigent. J’ai vite dû me mettre au niveau, et le changement du novillo au toro a été très marqué pour moi »
En 2022, ce sont 10 matadors de toros français qui ont toréé au moins une corrida. Certains sont restés sur le carreau sans porter une seule fois l’habit de lumière. La concurrence est rude. Au moment de savoir ce qu’il faut à un torero pour se différencier, El Rafi rappelle qu’il est essentiel de rester soi-même « Je ne peux pas forcément me qualifier par rapports aux autres, ce sont plutôt les aficionados qui pourront dire que plus/moins quelque chose. J’ai ma propre personnalité et ma manière d’être en tant qu’artiste et c’est ça, qui à mon avis, me démarque des autres. Je pense qu’un grand torero c’est fait pour évoluer. Il peut être capable de changer sa manière de toréer tout en gardant sa personnalité. Mais sans forcément poser de mots là-dessus, les aficionados pourront eux-mêmes trouver les éléments pour différencier les toreros. » Devenir un grand torero, El Rafi en rêve comme la majorité des aspirants figuras. Mais cela passe par encore plusieurs étapes qui se traduisent toute par le même mot « Ce qu’il me manque ? C’est de toréer tout simplement, mettre le costume et continuer à toréer. » C’est en partie là-dessus que repose la progression d’un torero « Il me manque de l’expérience. Evidemment, la technique, j’en ai moins qu’un torero expérimenté parce que je suis matador de toros depuis seulement 2 ans. Avec l’envie de réussir et l’envie de m’exprimer, ça permet de corriger mes défauts et continuer à progresser »
Au moment d’aborder la temporada à venir, le temps est encore aux discussions. Des pourparlers sans aucunes certitudes mais un seul objectif « En 2023 je veux pouvoir m’exprimer pleinement à chacune de mes sorties et de pouvoir faire passer des sensations au public. J’ai envie de pouvoir m’exprimer en tant qu’artiste sur la piste. C’est ce qui a de plus beau pour un torero. »
Avant de terminer notre entretien, j’ai voulu revenir sur les informations chaudes de ces dernières semaines. La tauromachie a été remise en question devant la France entière poussant la monde taurin à la solidarité, notamment les matadors de toros. Discrets dans leur globalité pendant un long moment, il se sont fait entendre en se déplaçant à la capitale pour défendre la tauromachie devant les médias. El Rafi nous raconte brièvement comment se sont déroulés les évènements « 1 mois avant notre voyage à la capitale., j’ai eu Julien Lescarret au téléphone, et on a émis cette idée de monter à Paris. Je ne voulais pas porter un jour ce fardeau « Qu’est-ce que nous avons fait le jour où on a voulu nous détruire ? ». Il était important que tout le monde se mobilise. Avec les matadors de toros français, on est allé à Paris pour pouvoir parler aux médias. C’est partie d’une bonne intention avec l’idée de se faire entendre. »
Face aux médias, El Rafi a été l’un des principaux protagonistes, se retrouvant en radio face à des opposants parfois virulent. Le nîmois préfère tirer du positif de cette histoire « J’ai vécu très bien ces différents moments. J’ai été une semaine avant le rassemblement à Paris à France Inter où ça s’est très bien passé. C’est aussi grâce à ça que j’ai fait d’autres médias après. Personnellement, j’ai trouvé ça très positif la proposition de loi Caron car on a pu avoir de la visibilité sur les médias nationaux. C’était important qu’on montre ce visage là de la tauromachie à la France, qu’on montre que nous ne sommes pas des barbares ou des tortionnaires. » La messe est dite, la Loi n’a pas été voté, le monde taurin est (pour l’instant) sauvé.
Concernant El Rafi, la Temporada 2023 se prépare dans l’ombre, à base de travail intense. Les prochains rendez-vous seront déterminants pour qu’El Rafi puisse accéder aux Férias les plus importantes de notre pays, avant pourquoi pas, prendre la direction de l’Espagne !
Jean Dos Santos